Scène précédente dans l'Anneau désert -> Ouverture - Cortège funèbre

PLAN DE SCÈNE

- Source: Solo de simonE - Carrefour_valise; trottoir_Exposition de la fugue de Simone./ Prise de colère, enferme le manteau (Secret de simone) dans la valise maintenant vide. Motif : protéger Béatrice,/poser son cadre sur la table de nuit;

MEERUT, Inde : Le Carrefour

   Piste musicale: Rang de Basanti (6:03),
   Jeu du carrefour et des bagages; accessoires: bande sonore imposante, valise + manteau de lion (pantomime) 

Encerclée par une douche de lumière, Simone se retrouve propulsée au milieu d'un carrefour à Meerut. Elle se met à courir autour de la scène, sa lourde valise, un grand manteau de fourrure l'encombrant considérablement. Elle tente de fuir le projecteur, lançant des cris de clowne effarée, assourdie par le mélange de musique foraine et le bruitage d'une ville frénétique (klaxons de voitures, cris de marchands, passages d'avions, bruit multiplié des pas d'une foule compacte sur le trottoir, crissements de pneus, elle est assaillie de toutes parts et se débat comme un diable contre l'énorme cité asiatique, lumineuse et vorace. Dominant le vacarme, en viennent à s'imposer des bruits non humains, comme le mugissement de vaches sacrées qu'on dérange ou les cris d'une horde de singes affolés... De soubresauts en feintes, au fil d'une série de «avance-recule», elle finit par traverser l'intersection et triompher de la bête!!!

Trois panneaux de bois viennent peu à peu former à l'avant-scène un cube ouvert au public. La structure doit donner un fort sentiment d'étroitesse. De l'autre côté des panneaux, on entend Simone discuter avec le caissier de l'hôtel (Enseigne lumineuse affichant HOTEL flotte un temps au-dessus de sa tête) Pendant le court dialogue, l'éclairage diminue sur scène pour se concentrer sur la petite chambre. Dans cette chambre, on retrouve un lit, une petite table de chevet et l'homme-patère, tout habillé de noir, visage couvert, avec un crochet à manteau dans le front (c'est lui qui habitera le manteau de lion).

Proposition scénique 2 (consulter la page discussion): autre idée, le dialogue entre le
propriétaire et Simonepeut se dérouler à jardin ou à cour, du côté de l'entrée de la 
chambre, afin que le spectateur puisse voir la scène. Alors, la chambre peut être plongée
dans le noir et l'on ne voit que la projection de la traduction : ce n'est que lorsque
Simone entre dans la chambre que l'éclairage se fait sur la chambre, augmentant ainsi la 
surprise du décor et de l'homme-patère. À noter que ce dernier effet d'éclairage peut être
aussi utilisé si le dialogue Propriétaire-Simone est joué derrière le panneau du fond, 
tel que précédemment proposé.


SIMONE

Do you have any room for the night? How much money for a room? English? Speak English, do you? Criss, just a little seconde que j'find mon dictionary... Bon, voilà! Euh... Esti... (Traduction hindi, à dire en saccades, la traduction pouvant être projetée, selon le désir de mise en scène, sur le mur du fond de la chambre ou sur le devant du lit) ... Agara āpa rāta kē li'ē upalabdha ēka kamarā hai?


VOIX HINDIE, répondant par l'affirmative

Hām̐


SIMONE

Kitanā, Kitanā - Combien de roupies pour la chambre? Kitana rupayā? Rupaya?


VOIX HINDIE

Tīna sau rupa'ē.


SIMONE, avec effusion et déférence, multiplie les saluts de tête, les poignées de main, les claques dans le dos

Trois cent roupies, merci youppi! Thank you beaucoup! Dhan'yavāda


VOIX HINDIE,la retient un instant

Kyā āpa Simonak Tremblay?


SIMONE SimonaK, c'est ben moi! Hahahaha, Simonak, c'est ben certain que c'est moé. Personne est-il arrivé avant moi? Monsieur Personne? Comprendre? Monsieur Nobody en personne!!! Je vous le jure! (elle se bidonne)


VOIX HINDIE, il rit aussi mais ne comprend visiblement rien

Āpa kē li'ē ēka patra (il lui remet une enveloppe)


SIMONE

Une lettre? Pour moi? (joue la surprise) Ah non, pas lui! Aussi fidèle qu'un créancier. (imite l'intonation hindie) Comment il fait pour me retrouver chaque fois? L'Asie, n'est-elle assez grande pour me perdre? Lalalala, le bout du monde, oui, je sais, je sais, c'est un trou perdu... j'y vais, de ce pas monsieur, merci monsieur. (Elle continue de trop remercier le caissier tout en se retirant)

Dhan'yavāda. Bonne nuit! Śubharātri!


Transition musicale: Isqoqodo (3:06), Album: Spirit of Africa. percussions, rythme modéré mais sautillant. Rituel de la valise + jeu du combat avec le lion; Accessoires: valise + manteau


Simone se faufile entre deux panneaux et entre dans la chambre exigüe. D'un regard, elle embrasse le lieu et s'en déclare satisfaite. Posant sur le lit valise et manteau, trop contente, elle commence aussitôt à déballer ses affaires. Vive et précise, elle décide d'un endroit où déposer chacun de ses effets dans la chambre (cadran, lunettes énormes et nez de clown sur le bureau, souliers près de la porte. Elle déploie ensuite le manteau de fourrure, fauve et - Ô surprise! - habité d'une troupe de puces savantes qui la salue aussi joyeusement qu'un caniche. Tandis qu'elle va accrocher tout le bastringue à l'homme-patère, elle retombe sur l'enveloppe qu'elle regarde sans l'ouvrir, ne sachant trop quoi faire avec. Elle hésite, la laisse tomber sur la table de chevet, retourne à la valise, hésite, regarde la lettre de loin, fouille le fond de sa valise et en sort un bonnet de nuit ridicule, ferme sa valise et la pousse sous le lit. Elle se glisse sous les draps et se plante le bonnet sur la tête, pogne la pis-tourne, fixe la lettre sur la table, se retourne faisant dos à l'enveloppe. Elle retourne la tête et fixe la lettre, comme si elle ne pouvait s'empêcher d'y penser, incapable de résister à la curiosité de l'ouvrir, mais dans la peur d'y trouver quelques mauvaises nouvelles. Elle finit, poussant un ample soupir, par céder à la tentation et prend l'enveloppe, l'ouvre, déplie la lettre et lit. À mesure qu'elle lit «en silence», le texte est projeté, paragraphe par paragraphe, avec date et signature, sur le bout du lit, qui fait face au public. Sautant du manteau, les puces entourent Simone et amorcent avec elle une chorégaphie sautillante, comme si elles marchaient sur des charbons ardents.


JULES:

Chère Simone, La tournée d'InSitu progresse et nous devrions gagner le territoire des Attikameks avant la fin du mois d'août. Le spectacle avance plus lentement. Nos vieux amis s'épuisent. Nous coupons sans cesse dans leurs scènes pour transformer ce qu'ils ne sont plus capables de faire. Surtout Vieux-Léon qui sombre lentement dans l'oubli tandis que notre Béatrice, lucide, noble, somptueuse dans son bel âge, renouvelle au quotidien chansons et tendresses pour lui.

Sa décision de suivre Vieux-Léon dans la mort ne fléchit pas.

Sa confiance est infaillible, sa conviction profonde qu'on y sera tous pour eux, le temps venu. Et il approche, ma belle Simone. Tu m'as promis que tu y serais. Tu as juré que tu reviendrais à temps. Et je sais qu'en ton for intérieur, tu veux être là. Ton idée de partir pour les motiver à vivre encore un peu, à accepter une autre tournée ne fonctionne plus. Oui, ils sont encore avec nous mais ils font peine à voir. Le temps les consumme à feu vif. Plus tu retardes, plus tu les retardes eux, c'est bien vrai mais quel jeu cruel! Ils ne veulent plus jouer, Simone. Reviens, le temps de dire adieu. Reviens vite, je t'en prie. Ils t'attendent comme moi, ton vieil ami, qui te le demande une dernière fois pour eux. Je n'en peux plus de les voir ainsi... Élisabeth a signé le contrat hier. Je te confirme que nous présenterons, à l'équinoxe, La Légende du Tilleul fidèle sur l'agora naturelle du Domaine des Aigles. Il te reste moins qu'un mois pour ramener tes fesses auprès des tiens.

Jules. XXX

P.S.: Pardon de te le dire comme ça, mais je ne crois pas en ton aventure avec ce personne, ce dompteur mystérieux de puces savantes. Je crois que tu nous mènes en bateau depuis le début et qu'il n'existe pas, que tu fais tout cela pour te sauver de ta promesse. C'est la dernière fois que je t'écris à ce sujet. La décision t'appartient désormais. Avec ou sans toi, à l'équinoxe, on jouera La Légende.


Elle plie la lettre et la pose sur la table de chevet. On sent que la lettre l'a profondément émue, torturée, abattue. Cela dure un moment, durant lequel, surprise, le manteau (l'homme-patère l'enfilant) se met à bouger. Subtilement d'abord, puis de plus en plus amplement. Le numéro clownesque commence dès lors que Simone remarque le mouvement du manteau. D'abord curieuse, elle s'approche doucement, à quelques centimètres du manteau qui reste immobile. Elle l'observe sous toutes ses coutures, comme doutant soudainement que le manteau a réellement bougé et si tout cela n'est pas dû à son imagination. Elle finit par s'en retourner vers son lit, agacée par sa folie imaginaire. Dès qu'elle est retournée, le manteau en profite pour s'avancer et grogner légèrement. Simone s'immobilise, le manteau aussi! Simone se retourne lentement, voyant le manteau immobile se revire encore, le manteau bouge, Simone se retourne par l'autre côté, manteau immobile, se revire encore. Simone feint d'aller au lit quand le manteau, d'un coup, voyant que Simone s'en va, lâche un grand grognement! Simone sursaute et tombe dans son lit, se retourne, fait face au manteau qui s'est mis à quatre pattes et qui s'est transformé en un terrible lion de Némée, le crochet à manteau devenant peut-être une terrible corne.

LE COMBAT COMMENCE!!!!! Jeu de la porte/Jeu du lit

Simone finit par attraper le lion et l'étouffe. Simone, serrant toujours férocement le manteau, sort la valise de sous le lit et y enferme rapidement le lion, de peur qu'il ne re-sorte! Fermant enfin la valise, Simone la pousse sous le lit. Essoufflée, le coeur pompant, elle se calme, regarde sa chambre. Tout va bien. Elle reprend son bonnet, tombé dans la bataille. Elle retourne dans son lit, replante son bonnet sur sa tête, se calme en jouant avec son nez rouge. Tout va bien. Tout va mieux, du moins. Simone se couche, l'éclairage diminue jusqu'au noir. (effet sonore) Dodo!


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